LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE
Pour la faculté, les années 1914-1918 sont de terribles années noires dans une ville de Lille occupée par les Allemands.
Le siège de Lille (10 au 12 octobre 1914) se termine par la victoire allemande et le 13 octobre 1914, les troupes de l’Empereur défilent dans la ville.
Commencent alors 1465 jours d’une terrible occupation où les réquisitions de matériels, de denrées mais aussi de main d’œuvre, les vexations et les pillages sont multiples jusqu’à la Libération de Lille le 17 octobre 1918.
Touchée par la mobilisation de très nombreux étudiants, de ses enseignants les plus jeunes mais aussi par le repli de la plupart des autres enseignants vers la zone non occupée, la faculté est en grande partie désertée.
Sur les 21 enseignants présents en 1913-1914, il n’en reste plus que trois pour la reprise des cours en 1915 : le professeur Derocquigny qui fait office de doyen, le professeur Langlois et M. Raison, chargé de cours. Ernest Langlois est ensuite évacué en zone libre pour raison de santé (1916).
Sept enseignants de 1913-1914 sont mobilisés alors que les autres se sont repliés et se mettent au service de la patrie en danger, enseignant dans divers établissements de la France non-occupée.
Les 341 étudiants de l’année 1913-1914 ne sont plus que 22 en 1914-1915 puis 55 en 1915-1916. Mais la faculté exprime la volonté farouche de survivre, affirmant ainsi un îlot de culture française dans une zone aux mains des Allemands. Les étudiants, surtout des étudiantes, sont 107 en 1916-1917 et 101 en 1917-1918.
Dans cette lutte permanente pour la survie afin d’affirmer « l’existence et l’action morale de l’Université », le recteur Georges Lyon, président du Conseil de l’Université joue un rôle capital et mobilise les énergies encore présentes à Lille.
La faculté de droit (la moitié du bâtiment de la rue Angellier) étant réquisitionnée par la poste militaire bavaroise, les salles de la faculté des lettres, contiguës, abritent les cours de droit mais aussi ceux du lycée Faidherbe.
La situation se complique cependant en avril 1918 car un service allemand s’installe dans les bâtiments de la préfecture du Nord qui se replie dans la plupart des salles de la faculté des Lettres. Le 16 mai 1918, après de multiples venues d’officiers dans ses locaux, le maire transmet au recteur l’ordre allemand de mettre à la disposition des autorités d’occupation, l’ensemble des bâtiments de l’Université.
Les protestations énergiques du recteur Lyon sont vaines.
La faculté des lettres se contente alors de locaux de fortune et de petites salles non occupées.Tout au long de la guerre, les réquisitions sont nombreuses. En octobre 1917, les Allemands réquisitionnent les cuivres et partent avec les plaques de calorifères et les lampes de bureau.
Les bâtiments universitaires sont aussi fortement touchés par les destructions. L’explosion d’un grand dépôt de munition (« Les 18 Ponts »), le 11 février 1916, provoque de terribles dégâts à la faculté des lettres brisant la plupart des vitres et faisant tomber de nombreux plafonds.
Le 23 septembre 1916, trois bombes tombent sur la faculté dont l’une détruit une bonne partie de l’Institut d’histoire de l’art. En février 1917, le général Von Graevenitz ordonne la fermeture des établissements scolaires et universitaires pour cause de pénurie de charbon.
Le recteur Georges Lyon décide alors de mettre à disposition des facultés, ses propres appartements au rectorat. Les restrictions dans la circulation empêchent aussi progressivement certains enseignants de venir à Lille.
En octobre 1917 puis en mars 1918, les laissez-passer sont refusés et certains professeurs font cours chez eux à Tourcoing et Roubaix. Au milieu de tant de difficultés, la faculté maintient un mince filet de vie universitaire, affirmant, à sa manière, son devoir patriotique. On recrute des enseignants du secondaire (dont la première femme travaillant à la faculté, Mademoiselle Raison) qui assurent les cours de base en supprimant les spécialités. Le même enseignant assure ainsi tout l’enseignement historique et géographique. Il y a cinq étudiants qui préparent la licence en 1914-1915, 17 en 1916-1917 et 23 pour la dernière année d’occupation. Lorsque sonne enfin l’heure de la délivrance, la faculté célèbre certes la victoire du « droit sur la barbarie » mais pleure aussi un garçon de salle et 49 étudiants morts pour la patrie tout en songeant aux nécessaires reconstructions qu’il faudra entreprendre.
Lors de la séance de rentrée du 17 janvier 1921, Georges Lyon rend hommage aux victimes de la guerre.
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