BIOGRAPHIES DES FIGURES EMBLÉMATIQUES DE L'UNIVERSITÉ
JANKÉLÉVITCH VLADIMIR
Professeur de philosophie morale et de science de l'éducation (1903-1985)
ÉTUDES
Élève du lycée de Bourges puis du lycée Louis-le-Grand de Paris ; baccalauréat ès lettres ; admis à l’École normale supérieure en 1922 ; scolarité à l’École normale supérieure (1922-1925) ; licence ès lettres ; agrégation de philosophie en 1926 ; service militaire en 1926-1927 ; doctorat ès lettres en Sorbonne, le 29 avril 1933.
PARCOURS PROFESSIONNEL
Enseignant à l’Institut français de Prague (1928-1932) ; professeur au lycée de Caen (1932) ; professeur au lycée du Parc à Lyon (janvier 1933) ; nommé maître de conférences de philosophie à la faculté des lettres de Besançon (octobre 1935) ; nommé maître de conférences de philosophie à la faculté des lettres de Toulouse en 1936 ; chargé de cours de philosophie à la faculté des lettres de Lille en 1937-1938 ; nommé maître de conférences de philosophie morale et de science de l’éducation à la faculté des lettres de Lille (1er octobre 1938) ; radié de l’Université par le régime de Vichy pour ses origines juives ; résistant dans le Sud-Ouest ; détaché au CNRS en 1945 ; retrouve son poste lillois en octobre 1947 ; muté en Sorbonne en 1951 ; occupe la chaire de philosophie morale à la faculté des lettres de Paris jusqu’à sa retraite en 1978 ; enseigne jusqu’en 1981.
PRINCIPAUX OUVRAGES
Bergson ; L’odyssée de la conscience dans la dernière philosophie de Schelling (thèse, 1933) ; La mauvaise conscience (1933) ; Ravel (1939) ; Le Mal (1947) ; Traité des vertus (1947) ; Debussy et le mystère de l’instant (1949) ; L’alternative (1950) ; Gabriel Fauré et ses mélodies (1951) ; L’austérité et la vie morale (1956) ; Le je-ne-sais-quoi et le presque-rien (1957) ; Le pur et l’impur (1960) ; La musique et l’ineffable (1961) ; L’ironie (1964) ; La mort (1966) ; L’irréversible et la nostalgie (1974) ; Quelque part dans l’inachevé (1978) ; Le paradoxe de la morale (1981) ; L’imprescriptible : Pardonner ? (1986) ; Premières et dernières pages (1994). Nombre considérable d’articles dans les revues de philosophie mais aussi dans la presse.
REMARQUES COMPLÉMENTAIRES
Connaissance des langues russe, grecque, allemande et latine. Grand pianiste et spécialiste de musique ; directeur des programmes musicaux à Radio-Toulouse-Pyrénées en août 1944.
Le doyen de la faculté des lettres de Lille signale aux autorités en novembre 1940 : « Excellents états de services de M. Jankelevitch, maître de conférences de philosophie morale et de science de l’Éducation [...]. Il a été mobilisé le 24 août 1939, a fait toute la campagne 39-40. Blessé au cours des derniers combats, il a terminé sa convalescence dans le midi [...]. Il supplée à Toulouse un professeur prisonnier » (Arch. dép. Nord, VM 146 171, séance du 8 novembre 1940).
Il est, en 1939, affecté dans une unité de transport ; blessé dans les combats de juin 1940, il est soigné à Marmande ; révoqué de ses fonctions universitaires pour ses origines juives (non-possession de la nationalité française à titre héréditaire), il mène alors une existence secrète sous de fausses identités. Il aide les réseaux résistants à lutter contre le service du travail obligatoire (passage en Espagne des étudiants et des jeunes du Sud-Ouest). Membre du réseau clandestin Ajax, du réseau Les Étoiles ; auteur d’une brochure clandestine qui dénonce le racisme et l’antisémitisme publiée en 1943 (Le mensonge raciste) ; il est réintégré dans l’Université en janvier 1945.
Vladimir Jankélévitch participe à la plupart des grands combats politiques des années 1945-1985. Il incarne ainsi la figure de « l’intellectuel » qui met sa renommée scientifique au service de la défense de certaines valeurs. Grand pétitionnaire. Le Dictionnaire des philosophes signale son « engagement quotidien dans la société humaine de son temps » (p. 1335) ; il multiplie en effet les combats pour la défense des valeurs liées à la Justice, à la Liberté et au respect des Droits de l’Homme (en particulier lors de la Guerre d’Algérie). « Professeur éblouissant [...], don de la parole [...], habileté avec laquelle il manie la métaphore ou l’analogie [...]. Vladimir Jankelevitch n’est pas seulement un penseur de cabinet, un professeur enfermé dans ses livres. La morale n’est pas simplement pour lui, un sujet de dissertation. C’est d’abord et surtout une théorie de la pratique [...]. Comme pour Socrate, le sentiment de l’action nécessaire [...] et de la fidélité aux engagements fondamentaux de la personne a toujours beaucoup compté pour lui » (Le Monde du 8 juin 1985).
Idées politiques de gauche mais « refus du marxisme » signale le journal Le Monde du 8 juin 1985.